lundi 28 février 2011

LANGUE DE BOIS ET VOLEE DE BOIS VERT !

L'avantage avec le cliché c'est qu'il ne s'accommode guère des circonstances, partout il s'agit d'occuper l'espace interprétatif en mettant un label identique qui se passe de toute explication et justification et renforce les pires poncifs sur le mode de « cela va de soi » ; en l'occurrence je cite cet extrait d'une tribune de Fathi Chamki, publiée sur Mediapart, il s'agit du responsable d'Attac-Tunisie :
"La Tunisie a été socialement exsangue tout au long des 23 ans de règne du capitalisme néolibéral.L'austérité sociale, la casse de l'emploi, la marchandisation des services publics fondamentaux, auxquels s'ajoutent une politique fiscale prédatrice et les pratiques mafieuse des clans de Ben Ali ont saigné à blanc la Tunisie".
Cette "analyse" est à mettre en relation avec la formule de Moncef Marzouki, Président du Congrès pour la république, candidat à la prochaine présidentielle tunisienne, qui dans un entretien à Libération ce jour déclare, déplorant la lenteur de la transition :
«C'est une révolution de la jeunesse et la voilà conduite par un vieillard de 84 ans!»
Je ne vois pas dans le contexte tunisien ce que peut bien signifier "capitalisme néolibéral, marchandisation des services publics fondamentaux", dans un pays où l'État était partout, où la liberté d'entreprendre était mise au pas par la corruption, je vois bien ce que sont là-bas des "jeunes révoltés" et la confiscation de leur révolte par des vieillards blanchis sous le harnais de Ben Alli, je vois bien ce qui a poussé Mohamed Bouazizi à son geste désespéré... Rien qui ressemble au Grand soir marxiste qu'attendent fébrilement tous les nostalgiques de l'ancien régime soviétique. Le petit catéchisme folklorique d'Attac déclamé partout même quand il ne renvoie à rien de réel, sur le mode hallucinatoire, manque les revendications exprimées par les jeunes pour un blabla généraliste destiné à rassurer le gauchisme sénile dans ses croyances :
"On dit que Facebook a été le catalyseur de la révolution. C'est certainement exagéré, mais c'est l'indice de ce que les Tunisiens, même pauvres, même forcés, bac ou licence en poche, à vendre des légumes sur le trottoir, ont des aspirations de Premier monde. Ils veulent de la démocratie, des libertés publiques et certainement pas un Etat qui décide de tout jusqu'à la gestion des chaînes de salons de coiffure. Hugue Serraf,
http://www.rue89.com/tribune-vaticinateur/2011/01/22/en-tunisie-une-revolution-liberale-186815
Pour reprendre la Formule de Lénine, ce que veulent les amis de la jeunesse et comment ils luttent contre les récupérateurs intéressés...

vendredi 25 février 2011

SOIS JEUNE ET TAIS-TOI !

Nous avions signalé un excellent article de Louis Chauvel, dressant un état des lieux particulièrement sombre de la jeunesse en France présentée comme un groupe social perdant sur tous les tableaux du modèle social "à la française". Terra nova prolonge la discussion par une réponse de Guillaume Allègre co-auteur du rapport Terra nova "L'autonomie des jeunes au service de la jeunesse". So what ? S'il partage avec Chauvel un même constat inquiet et insiste la nécessité de réformes profondes et structurelles (notamment en ce qui concerne un système éducatif marqué par l'échec et la disqualification, l'autonomie par le versement d'un "capital formation"), il en conteste très nettement les présupposés explicatifs : pour Allègre il s'avère "contreproductif" d'opposer les générations. Les classes sociales déterminent en effet selon lui des trajectoires distinctes selon les groupes d'appartenance : un jeune issu des banlieues n'a pas les mêmes opportunités et conditions d'étude qu'un fils de cadre supérieur, la cause est étendue, il ne saurait y avoir de condition commune, de sentiment d'appartenance.. Bref, il reproche à Chauvel de survaloriser les clivages générationnels quitte à passer au second plan la sacro-sainte "question sociale". Le raisonnement est pourtant douteux car la proposition inverse pourrait être tout autant avancée : à force de se focaliser sur la question sociale, on risque de passer sous silence tous les clivages et conflits qui travaillent des classes de prime abord présentées comme homogènes. On sait d'ailleurs que la réflexion féministe et la sociologie des "minorités" a souvent critiqué cette approche "aveugle" qui dissout les problématiques spécifiques dans un grand discours générique, d'inspiration marxiste ou républicain.
Une approche par classe n'est qu'un modèle sociologique abstrait parmi d'autres, sans doute le modèle générationnel n'a-t-il dans le sciences sociales française eu jusqu'à présent qu'un faible écho mais la question est de savoir si ce modèle est opératoire pour rendre compte d'une problématique sociale encore largement ignorée. Peut-on en conséquence renvoyer les problèmes rencontrés par les jeunes dans leurs études, sur le marché de l'emploi, dans l'accès à l'autonomie, à une simple question d'inégalités sociales qu'un État providence au meilleur de sa forme redistributive pourrait sans doute solutionner ? Bien sûr que non. Le plaidoyer de M. Allège s'avère davantage être une défense inconditionnelle pro domo du vieil État providence avec toutes ses défaillances et ses impasses manifestes S'il concède volontiers qu'en matière éducative il convient en effet de s'atteler à des réformes (mais la gauche en aura-t-elle le courage politique ?), il présente le modèle de solidarité inter-générationnelle centralisé par l'Etat (prélèvement, redistribution) comme une organisation idéale bénéficiant à tous. Et à l'appui de cette déclaration déconcertante, il rappelle la mobilisation récente des jeunes contre la réforme des retraites... Les jeunes sauraient spontanément, magiquement, que ce modèle social est le meilleur des systèmes possibles, voyons M. Chauvel pourquoi vouloir opposer une jeunesse acquise à ses aînés quant tous se retrouvent pour communier dans cette église commune des "acquis sociaux" ! On pourrait objecter au sociologue qu'une enquête de terrain un peu poussée ferait sans doute apparaître les motivations multiples, contradictoires, paradoxales, qui ont poussé les jeunes à manifester, à la grande surprise des syndicats et des partis de gauche et ce ne serait sans doute pas la première fois que l'insurrection des jeunes serait récupérée pour permettre aux professionnels de la politique de faire avancer leur petite entreprise. Cette enquête révèlerait que ces manifestations avaient peut-être un caractère symptomatique, et que derrière les cortèges et leurs slogans faciles sans doute se lisaient une inquiétude et une envie réelle de peser et de participer sur les grands choix de la société. Mais le problème de M. Allègre n'est visiblement pas le jeunesse "en galère", assignée à une condition dégradée, c'est la défense inconditionnelle d'un ordre symbolique (un "marqueur") même si cela doit se faire sur le dos d'une partie de la jeunesse. Il n'est pas le seul : à gauche hors du vieil état providence point de salut ! Rien de bien neuf mais tout de même c'est étonnant de la part d'un think-thank qui prétend préparer 2012, la gauche est toujours embourbée dans l'étatisme du programme commun, les lendemains qui déchantent s'annoncent.... Ce que l'approche classiste manque pourtant c'est l'expérience concrète de trajectoires individuelles avec à chaque fois les mêmes plafonds de verre mis en place pour les meilleures raisons du monde : inflation des diplômes, études interminables, universités qui ne mènent nulle part, concurrence redoutable en milieu scolaire, barrières, numerus clausus, stages, temps partiel... avec toujours la prime à l'ancienneté, un véritable chemin de croix qui ne concerne pas seulement les jeune des quartiers populaires, mais aussi ceux mieux lotis de Génération précaire. Entre la "place souhaitée" et la "place offerte", quel parcours du combattant, véritable "bizutage social".... Ce que Louis Chauvel pointe très bien, c'est que ce "modèle social" n'est en rien universel (encore la fiction universaliste !) mais bien générationnel ; derrière le mythe de la cohésion sociale, ce modèle repose sur un clivage entre insiders les outsiders, il donne toujours plus de droits et de "privilèges" à ceux qui bénéficient déjà d'une reconnaissance statutaire, et se consacre bien moins à ceux qui devraient être sa priorité (les jeunes, les femmes, les immigrés, les externes et autres outsiders), ils défend des places statutaires et non une mobilité sociale qui reste le grand problème de la jeunesse. Quel est cependant le grand domaine d'action de l'Etat-providence si ce n'est justement la question sociale, encore faut-il la poser dans les termes justes et actuels ; le vieillissement de la population, un chômage structurel dont la France n'est jamais sortie et qui conduit à une dévaluation des diplômes minent la confiance des jeunes générations dans ce "modèle social" qu'ils vont de plus en plus devoir financer sans en avoir les retombées et les bienfaits (la question de la dépendance pour les personnes âgées et de son financement sera débattue lors des prochaines présidentielles comme celle des retraites, pas sûr que la jeunesse figure sur les agendas du PS et de l'UMP). M. Allègre semble redouter l'apparition de clivages internes aux classe sociales comme si tous les acteurs qui les composent avaient de factro les mêmes intérêts ; le patron est-il l'ennemi de ses employés, certainement pas, a-t-il pour autant les mêmes intérêts et priorités ? sans doute non et c'est bien cette pluralité d'intérêt reconnus que l'Etat doit arbitrer et harmoniser. L'augmentation des salaires des enseignants répond-elle nécessairement aux aspirations des lycéens et des collègiens, va-t-elle mécaniquement améliorer la réussite des élèves, permettre de réformer notre système éducatif ? rien n'est moins sûr mais les syndicats sont satisfaits. Le terme générique de salariés recouvre-t-il l'extraordinaire hétérogénéité des situations ? les femmes ont-elles les mêmes revendications que les hommes, rencontrent-elles les mêmes difficultés ? les jeunes salariés ont-ils les mêmes revendications que leurs aïnés ?Entre les jeunes précaires et les salariés qui prennent actuellement leur retraite, peut-on réellement parler d'une communauté de destin et perpétuer la mythologie d'un salariat uniforme tandis que les clivages entrants/sortants n'ont jamais été aussi appuyés ? Chacun dans une société des individus aspire à être reconnu comme acteur et instance qui peut et doit participer à l'organisation du "social". IL ne s'agit pas de liquider l'État providence mais de le réinventer, dans des conditions historiques qui ne sont plus celles de 1945 ou de 1981, comme il faut repenser le contrat social qui lui est associé avec toutes les composantes de la société et les jeunes doivent avoir ici toute leur place car ils sont in fine les grands perdants du modèles social, la variable d'ajustement des politiques de droite comme de gauche. En définitive, le propos de M. allège nie la jeunesse comme catégorie et question sociale spécifiques pour la renvoyer à des déterminations socio-économiques somme toute très classiques, pire son propos évoquerait presque la question sociale telle qu'elle était posée dans les années soixante-dix ! On notera enfin que dans son discours la jeunesse apparaît comme un "poids social ", un acteur par défaut, qui appelle surtout des politiques d'assistance, à aucun moment il n'envisage que cette jeunesse puisse, pour peu que l'Etat providence réformé lui en donne les moyens, constituer une force créative, une richesse, un élément dynamique au bénéfice de l'ensemble de la société, et pas seulement sur le plan culturel et social mais surtout économique. Car en l'absence de relance économique (terrain sur lequel la gauche a depuis longtemps hélas rendu les armes) qui permettrait d'augmenter le nombre de places proposées, leur qualité et la mobilité des jeunes, on voit mal combien de temps ces jeunes paupérisés, condamnés à la survie,continueront à recevoir l'aumône du meilleur des systèmes possibles sans avoir envie comme en 2005 d'une franche insurrection.







L'UNEF SOUTIENT LE SOULEVEMENT DE LA JEUNESSE EGYPTIENNE

Depuis le 25 janvier, le régime égyptien est confronté à un soulèvement sans précédent. Face à la pression populaire, le président Hosni Moubarak a limogé son gouvernement vendredi. Mais alors que le départ de Hosni Moubarak constitue le principal mot d’ordre des manifestants et que la contestation qu’il affronte est avant tout politique et sociale, la nomination du chef des services de renseignement égyptiens, M.Soulemain, au poste de vice-président témoigne du recroquevillement du régime égyptien sur sa base militaro sécuritaire.

Dimanche, le mouvement de contestation a appelé à la grève générale et à une "marche d'un million" de personnes mardi au Caire et dans tout le pays, pour accentuer d’avantage la pression sur le régime. Malgré la répression et la censure, près de deux millions de personnes ont ainsi manifesté mardi dans les principales villes égyptiennes. Hosnie Moubarak a annoncé qu'il resterait au pouvoir jusqu'aux élections présidentielles de septembre et joue désormais la carte de la division mais les égyptiens continuent à manifester en appelant à un départ immédiat.

L’UNEF exprime son entière solidarité avec la jeunesse et l’ensemble de la société égyptienne. Alors que le taux de chômage des jeunes est de 20% et que les égyptiens sont confrontés à un régime autoritaire depuis 30 ans, l’UNEF soutient les aspirations légitimes de la jeunesse à la transformation sociale et démocratique.

L’UNEF condamne toutes les tentatives d'écrasement et de division du peuple égyptien. L’UNEF appelle les autorités françaises à ne pas répéter les mêmes erreurs qu’avec la Tunisie.

L’UNEF exige la libération de l’ensemble des jeunes arrêtés et de tous les étudiants et travailleurs emprisonnés en raison de leurs activités politiques ou syndicales.

Alors que les manifestations se multiplient dans de nombreux pays du monde arabe, l’UNEF appelle tous les étudiants à participer aux rassemblements de soutien aux soulèvements de la jeunesse dans le monde arabe.


http://www.unef.fr/delia-CMS/index/article_id-3221/article_page-3/topic_id-135/%C2%AB-marche-du-million-%C2%BB-en-egypte-l%27unef-exprime-son-entiere-solidarite-avec-le-s.html

SOULEVEMENT DE LA JEUNESSE....1952


UNE TRIBUNE DE MAXIME VERNER SUR MEDIAPART

"Maxime Verner, Président de l'association des Jeunes de France, répond à la chronique de Luc Ferry parue dans le Figaro du jeudi 24 février, à propos de la place de la jeunesse dans notre société. Pour lui, la restauration du pacte social passe par une rénovation des «dynamiques de solidarité intergénérationnelle».

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Je souscris sans peine à l'une des visions de Luc Ferry qui veut que notre jeunesse ne soit pas accablée par le poids de l'Histoire. Mais les drames historiques de la guerre d'Algérie ou de la Seconde Guerre Mondiale évincent-ils derechef le poids du bizutage social et de l'exclusion? Je ne le crois pas. Un taux de chômage alarmant pour les jeunes générations, le cantonnement dans un sous-marché de l'emploi, la difficulté à trouver un logement, autant de cicatrices sur le dos de notre jeunesse. 

Ces meurtrissures ne trouvent pas de causes endogènes, dans l'état d'esprit des jeunes Français. Bien au contraire, ils sont le lot d'un projet de société, d'une orientation économique et d'un choix social.

En effet, le collectif Génération précaire dénombre aujourd'hui 1,2 million de stagiaires en France. Ce chiffre, en augmentation de 50% depuis 2006, est le résultat d'une vision économique à court terme. C'est la volonté d'obtenir une productivité immédiate plus forte en omettant d'investir dans la ressource humaine d'avenir que constitue les futures générations. On préfère ainsi maintenir un marché du travail gratuit et parallèle, camouflet non déguisé aux jeunes de notre pays, plutôt que de 
les inscrire durablement dans le paysage de l'entreprise par un apprentissage tutoré pérenne. 

Des solutions existent face à cet état de fait.

Je ne crois pas que Luc Ferry emprunte une voie acceptable en cherchant «un discours à la jeunesse». Un discours à la jeunesse prendra invariablement les travers qu'il pointe lui-même: la démagogie jeuniste ou le tableau du déclin. Pour parler à la jeunesse, il faut avant toute chose parler à la société. En effet, ce n'est que dans une dynamique de solidarité intergénérationnelle que les jeunes trouveront, en France, une place digne de ce nom. La jeunesse n’est pas une tranche d’âge froide et limitée. C’est un état d’esprit, un rapport au monde qui vit de solidarité et d’équité mais également d’énergie, de travail et d’engagement. C’est une conception de la jeunesse qui n’est pas partagée par les pouvoirs de ce pays puisqu’aujourd’hui on préfère laisser les jeunes en dehors de la société, plutôt que de leur offrir la possibilité de soutenir notre édifice social. Cela revient en somme à extraire le moteur d’une voiture de son capot, tout en appuyant nerveusement sur l’accélérateur pour que la carcasse avance. La société dans son ensemble a besoin de la jeunesse comme d’une source de dynamisme et d’énergie. En écoutant sa jeunesse, la France verra enfin clairement ce qu’elle peut être demain. Notre pays doit écouter et essayer sa jeunesse, avant de vouloir lui parler. Paroles, paroles... Seule l'action politique redonnera de la valeur à sa parole, et les jeunes l'attendent encore.

Comment avons nous pu dériver si fortement? Nous voyons d’un côté des personnes âgées souffrant de solitude dans leurs appartements délaissés et à l’autre bout de la chaîne des âges nous découvrons des étudiants mis dans l’impossibilité de trouver un logement décent. Les problèmes des uns trouvent leurs réponses dans les forces des autres, et les opportunités des uns ne menacent nullement les autres. Ce sont les solidarités que nous devons retrouver dans notre vie quotidienne, et 
c’est pour cela que les pouvoirs publics doivent permettre la rencontre de ces deux populations dans une volonté de mixité générationnelle, partout sur le territoire. Le temps presse. Les jeunes ne demandent pas la charité à travers l'apprentissage, mais de devenir parties prenantes d'une dynamique sociale partagée.

Au sein d'une entreprise, le projet de l'apprentissage tutoré me semble être une solution viable. Dans le tutorat, ce n'est pas seulement le jeune salarié qui trouve la voie de son apprentissage professionnel, c'est également le «salarié senior» qui découvre une vision novatrice et dynamique. Cet échange intérgénérationnel est le meilleur antidote à l'anomie et à l'individualisme, délétère pour nos organisations. C'est également la meilleure solution pour que chacun trouve une place digne de ce nom sur le marché de l'emploi, et donc dans la vie. C'est à ce prix que la jeunesse construira au mieux la France de demain, en l'intégrant dès aujourd'hui pleinement."

http://www.blogger.com/post-create.g?blogID=575815905989148863

COURS CAMARADE LE CADAVRE BOUGE ENCORE !



Les évènements révolutionnaires qui traversent le monde arabe ont pris de court nos intellectuels toujours en retard sur toutes les révolutions ; inutile de s'appesantir sur ceux qui redoutent un devenir islamiste post-révolutionnaire en Égypte ou en Libye et regrettent déjà les régimes autoritaires et leurs leaders inamovibles. Leur discours n'est que trop prévisible ; non qu'une telle dérive ne soit pas envisageable mais est-il sérieux de soutenir que ces soulèvements n'ont pour autre ambition que de se débarrasser de Ben Ali ou de Kadhafi, de leur cours parasitaire, pour instaurer une théocratie dure qui supprimerait derechef toutes ces libertés si chèrement gagnées ? Passons aussi sur les partisans impénitents de la démocratisation à grand renforts d'interventions militaires stériles, destructrices et totalement inefficaces comme en Irak, ils ont eu ces dernières années tant d'occasions de manger leur chapeau ! Non penchons-nous plutôt sur les docteurs-es-révolutions de la gauche intellectuelle qui semblent dans le plus parfait contresens trouver dans ces soulèvements en cascade l'alibi suffisant pour sortir à nouveau leur cadavre (ne parlons plus de vieille taupe !) du placard.
Deux grands icônes de l'espace public, majeure et mineure, donnent la mesure de la nullité du débat en France : Stéphane Hessel, mélange de vieux sage, d'ancien combattant, à l'image de la démographie en France (que l'on relise le texte de Barthes consacré à l'abbé Pierre dans ses Mythologies), dont on peut saluer la trajectoire respectable. Mais voilà que cet infatigable indigné à durée indéterminée semble faire de ses combats lointains autant que périmés un horizon politique indépassable (éloge du vieil état providence qui prend l'eau de toutes parts) et du sentimentalisme de foire, type dame-patronnesse, le prêt-à-penser-et-agir ultime. Derrière les mots creux de "solidarité", de "justice", "d'égalité", "d'indignation" le vieil homme sympathique n'en étouffe pas moins les problèmes de la jeunesse actuelle au profit d'une montée en abstraction lyrique qui sied à tous les conformistes incapables de donner un avenir à cette jeunesse qui est le grand perdant de leur modèle social faisandé. Et la France ne manque pas de conservateurs de gauche comme de droite prêts à toutes les indignations dès qu'il s'agit d'introduire un peu de vie dans leurs musées Grévin ! Laissons les morts enterrer leurs morts et les pleurer, notre privilège sera d'entrer vivant dans le vie nouvelle (Marx)... Mais descendons plus bas (et non pas allons plus loin), Alain Badiou, dernier vestige de la guerre froide, après un petit pamphlet contre une petit président pas mal ficelé, en profite pour ressortir son grand amour de jeunesse, l'hypothèse communiste, dont il perçoit ici et là les signes palpables de son actualité, voire de son urgence. Inutile de chercher un inventaire critique du XXème siècle chez ce pur produit de la guerre froide, le stalinisme, le socialisme réel, la répression des opposants, le flicage généralisé, la pénurie, la misère... tout cela s'efface au profit des expériences sud-américaines récentes (Chavez bien sûr mais certainement pas Lulla qui avec succès a mené des réformes ambitieuses au Brésil, et obtenu bien des avancées sur le plan social, mais sans doute est-il encore trop "social-traitre" aux yeux de notre révolutionnarologue). Dans une tribune publiée dans le Monde du 18 février, Monsieur Badiou se prête au difficile décryptage "à chaud" des révolutions égyptiennes et tunisiennes. Sa prose mérite attention tant elle constitue pour les jeunes générations un morceau d'anthologie du "monde à l'envers" qui servait d'endroit à la langue de bois communiste :

- inflation de généralités, d'abstractions qui rendent impossible la compréhension d'une complexité réelle "sans mouvement communiste, pas de mouvement communisme", recours au présent de vérité générale ("le peuple, le peuple seul est le créateur de l'histoire universelle")...
- effet de manche, un classique du staline style, visant à disqualifier sans argumenter, les éventuelles objections : "il est obscurantiste de dire "ce mouvement réclame la démocratie". Faut il par là comprendre qu'il serait "progressiste" de dire que ce mouvement réclame la dictature du prolétariat ?
- plus inquiétant "une mystique du peuple" dont on semble attendre magiquement (on est bien loin du matérialisme dialectique) le "grand soir" paradisiaque la résolution de tous les problèmes de l'humanité (si ! Si !) :
"Le soulèvement populaire dont nous parlons est manifestement sans parti, sans organisation hégémonique, sans dirigeant reconnu. Il sera toujours temps de mesurer si cette caractéristique est une force ou une faiblesse. C'est en tout cas ce qui fait qu'il a, sous une forme très pure, sans doute la plus pure depuis la Commune de Paris, tous les traits de ce qu'il faut appeler un communisme de mouvement. "Communisme" veut dire ici : création en commun du destin collectif. Ce "commun" a deux traits particuliers. D'abord, il est générique, représentant, en un lieu, de l'humanité toute entière. Dans ce lieu, il y a toutes les sortes de gens dont un peuple se compose, toute parole est entendue, toute proposition examinée, toute difficulté traitée pour ce qu'elle est. Ensuite, il surmonte toutes les grandes contradictions dont l'Etat prétend que lui seul peut les gérer sans jamais les dépasser : entre intellectuels et manuels, entre hommes et femmes, entre pauvres et riches, entre musulmans et coptes, entre gens de la province et gens de la capitale". Quel catéchisme ! Depuis Jean-Paul II on a guère fait mieux !

. Une confiscation de la parole exprimée au profit d'une mise en ordre idéologique : il ne s'agit plus d'appréhender la nouveauté et la substance du mouvement révolutionnaire à la travers la polysémie de ses acteurs mais de l'inscrire a priori dans un discours normé dont il serait un l'illustration exemplaire et édifiante D'où l'importance accordée à l'exégèse, à savoir Badiou himself, qui doit traduire (et trahir) les aspirations des révolutionnaires dans le langage classique de la lutte des classes : « Les peuples tunisiens et égyptiens nous disent... » et s'ils nous disaient justement le contraire de toutes ces badiouseries ?

A ce stade là, on ne peut s'empêcher de penser à la formule de Castoriadis qui dans la revue Socialisme et Barbarie qualifiait l'URSS « d'état ouvrier dégénéré », il n'est plus aujourd'hui « d'état ouvrier » mais la décomposition du marxisme produit par réaction de curieux mélanges, à base de mystique, de falsification et d'éloge de l'action violente, chez les retraités qui s'en réclament encore :

  • pas de prolétariat ici mais des « classes populaires » qui ont payé le prix fort à lire notre révolutionnaire carte vermeil durant les manifestations au contraire des classes moyennes embourgeoisées, et nécessairement conservatrices : est-ce si sûr ? La démographie, le niveau d'éducation, en Tunisie... conduisent à une mobilisation révolutionnaire d'une jeunesse instruite, éduquée, et totalement privée d'avenir dans une société bloquée autoritairement, elle semble aspirer aux conquêtes qu'Alain Badiou méprise souverainement : la démocratie et le pluralisme s'accommode sans doute mal d'un « peuple » que l'on souhaiterait entendre s'exprimer d'une seule voix ( Ah, le bon vieux temps du parti unique ici remplacé par le peuple unique !).

  • Pas de prolétariat encore mais une mystique du petit peuple, du pauvre qui doit de manière symbolique mettre en accusation un monde injuste et annoncer le jugement dernier... nous sommes très loin des questions sociales et politiques et plus proches d'une théologie révolutionnaire (la révolution est la fin de l'histoire et l'avènement de la justice universelle !) à laquelle les mouvement tunisiens et égyptiens semblent pourtant très étrangers.

  • Enfin, au fond de cette dérive mystique, le noyau dur du XIXème siècles: pas de révolution sans violence : « On a partout parlé du calme pacifique des manifestations gigantesques, et on a lié ce calme à l'idéal de démocratie élective qu'on prêtait au mouvement. Constatons cependant qu'il y a eu des morts par centaines, et qu'il y en a encore chaque jour. Dans bien des cas, ces morts ont été des combattants et des martyrs de l'initiative, puis de la protection du mouvement lui-même. Les lieux politiques et symboliques du soulèvement ont dû être gardés au prix de combats féroces contre les miliciens et les polices des régimes menacés. Et là, qui a payé de sa personne, sinon les jeunes issus des populations les plus pauvres ? Que les "classes moyennes", dont notre inespérée Michèle Alliot-Marie a dit que l'aboutissement démocratique de la séquence en cours dépendait d'elles et d'elles seules, se souviennent qu'au moment crucial, la durée du soulèvement n'a été garantie que par l'engagement sans restriction de détachements populaires. La violence défensive est inévitable. Elle se poursuit du reste, dans des conditions difficiles, en Tunisie, après qu'on ait renvoyé à leur misère les jeunes activistes provinciaux. » On croit rêver, certains staliniens et conservateurs ont déjà fait le même coup en 1968 : ce n'est pas une révolution, il n'y pas suffisamment de morts ! Mais la violence n'a pas été le fait des manifestants, à chaque fois ce sont les pouvoirs menacés qui en Tunisie, en Libye ou en Egypte ont eu recours à la répression pour écraser la contestation. La violence n'est pas la condition première de la vérité dans l'histoire, ni la fatalité d'un mouvement révolutionnaire ! Quid du soft power que représentent les nouvelles technologies d'information et de communication au XXIème ? N'ont-elles pas pesé dans la mobilisation massive de la contestation au point de déborder le pouvoir ? Bien sûr, quand on en est encore au marteau et à la faucille, difficile de comprendre l'intérêt de l'ordinateur... Et Badiou d'ignorer totalement le rôle décisif de l'armée dans la victoire obtenue par les manifestants : dans des sociétés sans dynamisme économique, dominées par la corruption, la "hogra", l'armée représente encore le seul échappatoire pour des jeunes sans perspective, la seule possibilité d'échapper à la fatalité d'une situation misérable, Badiou a-t-il oublié l'exemple de l'URSS et de sa bureaucratie ? En Égypte l'armée est au coeur du pouvoir, comme en Algérie, le pouvoir « achète » la fidélité des jeunes sans avenir qui pourraient nourrir les bataillons de mécontents comme en Algérie aux côtés Fis dans les années 90 moyennant une « carrière » et quelques privilèges dans le maintien de l'ordre. Ce sont des alliés potentiels, et non des ennemis de classe ! Ce ne sont donc pas les « damnés de la terre » qui ont été à l'avant-garde des manifestations tunisiennes et égyptiennes mais bien les jeunes, demandant non pas le fin du « capitalisme » et de la « démocratie libérale » qu'ils n'ont jamais connus contrairement à Badiou, mais une liberté inconditionnelle (dont personne aujourd'hui ne sait comment elle se déclinera) qui rappelle davantage les révolutions libérales des siècles passées et l'écroulement inéluctable des « républiques soviétiques » (sic) après la chute du mur de Berlin. (snif...snif...un mouchoir ?). Cette "violence défensive" justifiée au nom de la nécessité révolutionnaire n'est-elle pas un adoubement de principe accordé à toute minorité autoproclamée qui ferait demain de l'élimination physique des "ennemis de la révolution" une oeuvre de salubrité publique ? Que disait le PCF en 1956 quand les manifestants en Hongrie étaient écrasés sous les chars soviétiques : "A peine quelques mois plus tard, le PCf choisissait de faire bloc et d'apporter son soutien total à la répression, par les troupes du Pacte de Varsovie, de l'insurrection hongroise. Dans cette répression nous aurions pu comprendre combien la politique des états socialistes contredisait les idéaux qui nous animent et combien elle salissait notre combat. Nous aurions pu voir, dans ce soulèvement incontestablement populaire, l'incapacité du système soviétique à concrétiser les idéaux du communisme, et donc la nécessité de tout remettre à plat. Nous n'y avons vu qu'un complot" (Marie-George Buffet, le PCF et l'année 1956, texte d'ouverture, www.gabrielperi.fr). Quel aveu ! Alain Badiou semble considérer que les classes moyennes ne sont pas véritablement partie prenante du "vrai peuple" pas plus que les jeunes d'ailleurs et que le "vrai peuple" doit pouvoir se défendre contre ses ennemis, le "faux" peuple... la référence à Marat annonce-t-elle quelque appel à une "terreur" rédemptrice et purificatrice ? Ni les classes moyennes, ni les classes populaires ne peuvent résumer le soulèvement des jeunes actuel qui de toutes les classes et de toutes les places demandent un changement de régime en Tunisie et en Egypte ; dans le hors-sujet Badiou et Allio-MArie, attachés à une lecture en termes de classes sociales, aveugles à la place singulière des jeunes dans ces mouvements, ne s'opposent pas mais forment bien un binôme complémentaire et prévisible.

  • « Oui, nous devons être les écoliers de ces mouvements, et non leurs stupides professeurs. Car ils rendent vie, dans le génie propre de leurs inventions, à quelques principes de la politique dont on cherche depuis bien longtemps à nous convaincre qu'ils sont désuets. Et tout particulièrement à ce principe que Marat ne cessait de rappeler : quand il s'agit de liberté, d'égalité, d'émancipation, nous devons tout aux émeutes populaire ». Oui, nous devons être les écoliers attentifs à commencer par Monsieur Le professeur (stupide ?) Badiou car ces mouvements renvoient de nos mobilisations sociales franco-françaises une image profondément conservatrice, incapables de proposer des réponses nouvelles aux problèmes que le pays rencontre, notamment en ce qui concerne la situation dégradée des jeunes. Oui le marxisme dégénéré est désuet, et il faut bien des contorsions et des falsifications pour y enrôler les jeunes manifestants de Tunisie et d'Egypte, non les émeutes populaires ne conduisent pas nécessairement au meilleur des mondes badiouesque, elles peuvent installer des théocraties, des dictatures (le nazisme a-t-il été seulement porté par la Bourgeoisie et les khmers rouges ne sont-ils qu'une invention du grand capital ?). Mais visiblement Badiou ne possède pas un logiciel adéquat pour comprendre le « mouvement réel des choses », une grammaire des révolutions un peu plus fine, et notamment le rôle révolutionnaire ambivalent des soulèvements de la jeunesse, et pourtant s'il était un tant soi peu attentif, il aurait pu s'interroger et méditer sur des discours comme celui-ci : « Toutefois, cette jeunesse révoltée a, aujourd’hui, un espace potentiel plus large. Saura-t-elle l’occuper ? En se situant sur les droits fondamentaux, individuels et collectifs, sur la constitution d’une démocratie vivante, de valeurs partagées et de lois communes, elle peut mieux s’ancrer dans la population et le paysage politique. L’enjeu n’est pas de choisir un porte-drapeau et de faire gagner son écurie. L’enjeu est de définir démocratiquement le terrain commun sur lequel, dorénavant, devront s’affronter les différentes manières de voir. L’appel au lancement d’une convention nationale, décentralisée, pluraliste, non sectaire, serait sans aucun doute opportun. Mais qui est en situation d’assurer sa reconnaissance, de garantir son pluralisme politique, la diversité des acteurs et son ancrage populaire ?" http://revolutiontunisie.wordpress.com/2011/01/13/le-soulevement-de-la-jeunesse-en-tunisie-est-une-vraie-revolte-politique/

jeudi 24 février 2011

UBU KADHAFI : STUPEFIANT !

"15h15 Kadhafi s'exprime actuellement par téléphone. Il n'y a pas d'images de son intervention. Il décrit la révolte actuelle dans le pays comme étant une «farce», ajoutant que les manifestants sont menés par par des jeunes sous l'emprise de «drogues».

Il accuse Al-Qaeda de tourner «les jeunes et les enfants» libyen contre le régime.

«Maintenant que la production de pétrole a cessé, comment les gens vont survivre? Est-ce que Ben Laden va soutenir le peuple? Comment les gens vont acheter des voitures, se marier ou acheter des biens qui ont été disponibles à faible coût?».

http://www.liberation.fr/monde/01012321913-libye-la-souffrance-et-le-bain-de-sang-sont-scandaleux-et-inacceptables

lundi 21 février 2011

ALGERIE : DE L'ETAT D URGENCE A L' URGENCE DES REFORMES !

"En conséquence, traduit en pratique, l’état d’urgence signifie qu’il ne peut y avoir de réunions publiques, de marches syndicales ou de création d’associations sans l’aval des autorités. Par ailleurs, sachant que la population algérienne riche de 36 millions d’âmes est constituée de 70% de jeunes ayant moins de 30 ans, il est clair que ceux nés en 1992 ont plus de dix-huit ans aujourd’hui ; c’est dire qu’ils n’ont connu que cette situation devenue «normale» pour reprendre l’une de leurs expressions favorites. Il est temps que l’Etat mette fin à cette situation injustifiée et de penser sérieusement à réformer démocratiquement le pays en le dotant d’institutions viables et de remercier la gérontocratie gouvernante dans tous les sens du terme ; ce, pour un développement politique durable."

Ammar Koroghli (Avocat-auteur algérien)
http://www.elwatan.com/contributions/idees-debats/mettre-fin-a-l-etat-d-urgence-la-revolution-pacifique-en-marche-21-02-2011-112709_240.php

dimanche 20 février 2011

UN COLLOQUE SUR LA JEUNESSE SANS LES JEUNES !

Je suis tombé par hasard sur ce compte rendu publié par Alger Presse du symposium qui s'est tenu l'année dernière à Tunis et qui avait pour thème La jeunesse et les défis d'aujourd'hui ; à la lumière des mouvements de libération menés actuellement par les jeunesses des pays arabes (Tunisie, Egypte, Lybie, Yémen et demain peut-être Iran et Algérie), en conflit ouvert avec les vieilles théocraties et les despotes locaux qui les privent de tout avenir, la teneur des discours tenus alors ne manquent pas de laisser rêveur :

"Les travaux du 22e symposium sur le thème "la jeunesse et les défis d'aujourd'hui" ont débuté, mardi à Tunis, avec la participation de représentants de 60 partis issus de pays arabes, africains et européens. La délégation algérienne comprend Aboudjerra Soltani, président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abdelhamid Si Afif, membre du bureau politique du parti du Front de libération nationale (FLN) chargé des relations extérieures et de la communauté algérienne à l'étranger ainsi qu'Abdessalem Bouchouareb, membre du bureau national du Rassemblement national démocratique (RND). Les participants à ce symposium de deux jours, organisé par le Rassemblement constitutionnel démocratique RCD) tunisien, débattront de trois principaux thèmes: "la jeunesse et le changement de repères", "la jeunesse et la révolution numérique" et "la jeunesse et la participation politique".

A cette occasion, le président tunisien, Zine El Abidine Ben Ali, a souligné que les pays, les communautés et les organisations internationales doivent prendre conscience de la place de la jeunesse, prendre leurs préoccupations en considération et appuyer les efforts dans ce sens. Dans le discours d'ouverture lu par son Premier ministre, Mohamed Ghannouchi, le président tunisien a mis l'accent sur le rôle des établissements éducatifs et des espaces culturels et médiatiques dans l'ancrage des valeurs de sacrifice, de bénévolat et de solidarité chez les jeunes. Dans ce sens, le chef de l'Etat tunisien a souligné que "donner la confiance aux générations futures, les préparer à assumer la responsabilité, les prévenir des dangers de l'exclusion et de la marginalisation est une responsabilité qui incombe à tous, particulièrement les partis politiques.
Nécessité d'ouvrir le dialogue avec les jeunes
TUNIS - Le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Aboudjerra Soltani, a souligné, mardi à Tunis, la nécessité d'ouvrir les voies du dialogue avec les jeunes et de prêter une oreille attentive à leurs préoccupations et leurs aspirations. Intervenant lors des travaux du 22e symposium sur le thème "la jeunesse et les défis d'aujourd'hui", organisé par le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) tunisien, M. Soltani a indiqué que le dialogue est le seul moyen de motiver les jeunes qui se désintéressent de leurs pays, leur religion, leur histoire et leurs valeurs culturelles et civilisationnelles". Il a, en outre, souligné la nécessité de responsabiliser les jeunes afin qu'ils puissent avoir confiance en leurs capacités et leurs compétences. Il a ajouté que la jeunesse arabe et musulmane en particulier et la jeunesse du monde en général est confrontée à un paradoxe entre la vie quotidienne et la vie idéale telle qu'elle est représentée par les médias.
La mondialisation a un très fort impact sur les jeunes, les incitant parfois à se "révolter contre toute chose" et à contester leurs conditions de vie, a indiqué le président du MSP. Il a également estimé que le dialogue constructif et fructueux avec les jeunes est la solution au désarroi chez cette catégorie et doit, a-t-il dit, se faire sans exclusion ou marginalisation.
De son coté, Abdessalem Bouchouareb, membre du bureau politique du Rassemblement national démocratique (RND) a insisté sur l'importance du thème "la jeunesse et la révolution numérique", inscrit à l'ordre du jour de la rencontre, mettant en exergue "la place prépondérante" qu'accorde l'Union Africaine au secteur des Technologies de l'information et de la communication (TIC). Il a, dans ce sens, indiqué que le symposium de Tunis coïncide avec la tenue d'un congrès international sur le développement stratégique des TIC sous le thème "pour une Afrique numérique". L'Algérie, qui compte 70 % de jeunes âgés de moins de 30 ans, considère l'économie de la connaissance comme étant un axe principal du développement notamment les TIC, a-t-il rappelé.

Pour sa part, Abdelhamid si Afif, membre du bureau politique du Front de libération nationale (FLN) chargé des relations extérieures et de la communauté algérienne à l'étranger a souligné la nécessité d'œuvrer à accompagner la catégorie des jeunes pour qu'elle soit à la hauteur des défis de la mondialisation."


http://www.djazairess.com/fr/apsfr/93455



On trouvera pour le moins amusant de voir qu'à cette occasion étaient conviés l'ensemble des partis politiques qui au pouvoir sans partage depuis des décennies bloquent les sociétés dont ils assurent l'encadrement autoritaire (le FLN algérien, le RDC tunisien) et représentent davantage un problème, un obstacle pour une jeunesse toujours plus importante numériquement dans ces pays, qu'une solution politique. A travers les interventions des vieillards en uniformes qui colloquaient en la circonstance se décline le discours conservateur qui ressasse les mêmes lieux communs : la jeunesse n'est plus à la hauteur des valeurs portées historiquement par ses pères despotiques ("se désintéressent de leur pays, leur religion, leur histoire, leurs valeurs culturelles et civilisationnelles"), elle ne se contente pas des places et des statuts proposés ("bénévolat, sacrifice et solidarité" sic !) par nos aimables philanthropes, nourrit une opposition non pas "contre toute chose" mais contre les conditions économiques et sociales qu'ils subissent et dont les bavards de ce symposium surréaliste sont les premiers responsables, il faut faire toute sa place aux jeunes sans céder une place, ni rien changer à nos privilèges... Plus inquiétant encore, cette jeunesse nourrit d'autres aspirations et ambitions que semblent redouter et déplorer cette amicale d'anciens combattants : influencée par une "mondialisation" qui déborde les potentats locaux, bien décidée à échapper à la misère qui est dans leur société un bien commun dont n'est privée qu'une caste dirigeante et ses amis, familière en effet des nouvelles technologies de communication, plus éduquée que ses gardes-chiourmes, n'ayant jamais connu la période coloniale et les luttes de libération, ni leurs mensonges établis, elle apparaît comme un acteur social émergeant, politiquement imprévisible, avec qui il faudrait compter (d'où les appels grossiers et paternalistes à un "dialogue constructif et généreux") : pourtant quand la jeunesse tunisienne manifeste, revendique pour participer à la vie politique, porte une exigence de réforme et de justice sociale, avec un sens aigu des responsabilités... le RDC a montré dernièrement et en vain avec quel zèle il peut apporter « ses » solutions policières aux revendications exprimées. Derrière la langue de bois de ce symposium, son humour involontaire, sa teneur pataphysique indubitable, c'est surtout l'aveuglement des élites politiques réunies qui frappent le plus ici, rappelant la posture d'un De Gaulle qui lui non plus n'avait pas vu venir le soulèvement de la jeunesse en Mai 1968 : poids démographique des jeunes, distance avec la tradition, absence de perspectives de mobilité sociale, niveau d'éducation, absence de pluralisme et de liberté politique, cooptation des ressources et des meilleures places par une clique de bureaucrates rentiers ... toutes les conditions sont réunies pour mettre les jeunes dans la rue : ni le nationalisme des luttes de décolonisation, ni l'islam politique, idéologies qui ont souvent détourné les révoltes des jeunes au profit des politiciens carriéristes qui les exploitent, ne semblent pour l'instant à même d'arrêter ce mouvement irrésistible. Sans doute à gauche en France est-on à demi satisfait : pas de procès en sorcellerie du grand capital, de la « mondialisation », de la finance internationale...mais une aspiration libérale à la démocratie qui n'aurait sans doute pas surpris un Tocqueville, la confirmation que la démocratie politique n'est en rien une exception occidentale, son particularisme, qui autoriserait dans le reste du monde les pires tyrannies sous couvert d'exception culturelle. A droite, on s'inquiète déjà du poids des islamistes dans ses soulèvements, on se berce encore de fables culturalistes sur l'incompatibilité des sociétés musulmanes avec la vie démocratique, on regretterait presque le despotisme aveugle d'un Ben Ali. Emmnuel Todd parle avec justesse de « normalisation » dans la mesure où le mouvement actuel prolonge les révolutions libérales qui ont marqué l'histoire de l'Europe et permis l'existence d'Etats démocratiques. Elles mettent à mal les fictions « communistes » et « socialistes » et leur recours incantatoires aux « peuples » (terme qui a pris la place symbolique et rhétorique de l'ancien prolétariat), les réformes exigées par les jeunes (partage du pouvoir et des richesses, redistribution des places, fin de la corruption, liberté et pluralisme politique) témoignent davantage de l'émergence d'une société civile autonome qui fait valoir ses droits que d'un renforcement d'un pouvoir de l'Etat et sa bureaucratie qui a été souvent une force d'oppression. Il reste aux jeunes à ajouter des revendications sociales aux revendications politiques : emplois, études, mobilités, les solutions "socialistes" mises en oeuvre par exemple en Algérie, sur le modèle de l'URSS, par le FLn ont démontré leur inéfficacité, le FLN au pouvoir a du grossir sa bureaucratie policière et militaire pour trouver des débouchés à des jeunes désœuvrés et sans avenir car il n'a jamais réussi à créer le dynamisme économique attendu depuis l'indépendance. La rente pétrolière et gazière redistribuée à la bureaucratie d'État permet d'acheter la paix sociale relative et de s'assurer la fidélité de ceux sans qui l'État ne pourrait fonctionner, privant l'opposition des leviers nécessaires pour prendre et exercer le pouvoir. Les solutions de type socialistes et communistes ont marqué les choix des pays sortis de la domination coloniale : le libéralisme n'en deplaise au NPA n'a jamais été la tasse de thé des gouvernements installés après les mouvements de libération qui ont toujours veillé à garder le monopole sur les richesses économiques, ne laissant pour ceux qui aspiraient à une vie meilleure que la solution de l'émigration ou une carrière dans la bureaucratie militaire. Hors des grandes idéologies désormais sans force (faillite du marxisme, défiance à l'égard des USA perçus comme impérialistes, inexistence de l'Europe, rejet du nationalisme et de l'islamisme), ces mouvements de jeunesses forment un laboratoire inédit qui ne peut prendre appui sur aucun précédent historique et doit inventer les solutions aux problèmes nouveaux qu'ils posent.


vendredi 11 février 2011

SALUT A TOI L'EGYPTIEN !!!

"Pour Barack Obama, 'l'Histoire est en marche'. Le président des Etats-Unis a assuré de son soutien à une'transition ordonnée et véritable vers la démocratie en Egypte'. 'C'est un moment de transformation qui est en train de se dérouler, parce que les Egyptiens veulent le changement', a ajouté le président, au début d'une allocution consacrée à l'Internet à haut débit dans la ville de Marquette (Michigan, Nord) où il effectuait un déplacement jeudi.

Les Egyptiens 'sont descendus en masse dans les rues, représentant toutes les générations et toutes les origines, mais ce sont les jeunes qui ont été à l'avant-garde', a remarqué le président américain, face à un public majoritairement composé d'étudiants."

http://fr.news.yahoo.com/64/20110210/twl-obama-les-jeunes-l-avant-garde-de-la-acb1c83.html

mardi 8 février 2011

HOMMAGE DE FREDERIC ACQUAVIVA A ALAIN SATIE (1944-2011)



Pour Alain
Je demande à Alain de le photographier, dans la cour du Palazzo Bertalazone, qui devait accueillir, à Turin, sa dernière exposition personnelle, en 2010.

Un de ses tableaux me regarde, tandis que je tente de dépasser ce sentiment d'écœurement face à l'injustice de la mort d'un créateur dont on devrait savoir qu'il a réalisé des oeuvres majeures au sein de ce mouvement décidément maudit qu'est le Lettrisme. Alain était aussi un ami, que j'ai du mal à imaginer ne plus revoir.

Peut-être, certaines oeuvres ne se mettent elles à vivre réellement qu'à la mort de leur créateur?
Frédéric Acquaviva

Alain Satié : Vitrail (encres sur toile), 1967