lundi 3 décembre 2007

ARCHIVE DE L'HUMANITE

J'ai trouvé dans les archives du journal l'Humanité (du 02 août 2007) cette note de Murielle Steinmetz à l'occasion du décès d'Isou. Malgré quelques erreurs et inexactitudes, voilà une brève qui changeait des habituels liens entre lettrisme et situationnisme.


Isidore Isou : l’esprit de la lettre
Décès . L’inventeur du lettrisme s’est éteint à l’âge de quatre-vingt-deux ans.

Isidore Isou est mort samedi à Paris à l’âge de quatre-vingt-deux ans. Il est l’inventeur du lettrisme, l’un des principaux mouvements d’avant-garde qui prit la suite du dadaïsme et du surréalisme dans les années cinquante.

Né le 29 janvier 1925 à Botosani, en Roumanie, Isidore Isou Goldstein, enfant surdoué (il lit Dostoïevski à treize ans, Karl Marx à quatorze ans, Proust à seize ans) a, en 1942, l’intuition de la poésie lettriste en parcourant ces mots de Keyserlin : « Le poète dilate les vocables. » Il arrive en France en 1946 et fonde immédiatement le mouvement littéraire lettriste. Dans la lignée des poètes futuristes et dadaïstes, il annonce la fin de la poésie des mots au profit d’une poésie des lettres et des signes où les sons et les onomatopées prennent le pas sur le sens habituel. Dans Bilan lettriste, il définit le lettrisme comme « un art qui accepte la matière des lettres réduites et devenues simplement elles-mêmes ». Parmi les ouvrages dans lesquels ce contestataire né théorise son mouvement, citons la Dictature lettriste (1946), Essai sur la définition et le bouleversement total de la prose et du roman (1950). Par-delà la poésie, le lettrisme entend aussi s’opposer au mode de vie prôné par le capitalisme. Isidore Isou vante le potentiel révolutionnaire de la jeunesse comme base de changement de l’économie. Il appelle à la subversion des normes édictées par les moeurs bourgeoises, et milite pour la libération des puissances du langage. Guy Debord, l’un des futurs fondateurs de l’Internationale situationniste, sera longtemps parmi ses proches avant la brouille qui aura lieu sur le tard. Isou a écrit sur des domaines aussi variés que la philosophie, la physique, les mathématiques. Il est le créateur de pièces de théâtre et de films expérimentaux. On lui doit un très beau roman, Je vous apprendrai l’amour. Même si le mouvement lettriste s’est parfois perdu dans des formes particulièrement alambiquées, il n’en demeure pas moins à l’origine d’oeuvres audacieuses comme le Syncinéma, de Maurice Lemaître.

Muriel Steinmetz