samedi 11 juillet 2015

RETROSPECTIVE BROUTIN : RETOUR DE BERLIN







photos de Daniel Loewenbroek
La Plaque Tournante propose un retour sur la trajectoire et l'oeuvre de Broutin, l'occasion de saisir in situ dans un lieu atypique les différentes facettes de l'artiste. Dans le sillage des évènements de Mai 68 Broutin rejoint le groupe lettriste et appartient à cette Nouvelle Génération dont les noms vont émerger dans la décennie suivante au gré des publications, revues et nombreuses expositions collectives (un véritable âge d'or...). Un style se construit, s'affirme, s'approfondit dans un dialogue notamment avec la prose d'Isou (les fameuses méticisations qui constituent la série Le Désir paradisiaque et l'externité). La rétrospective fait la part belle aux archives et offre un panorama assez simulant du travail de l'artiste, des ses figures significatives (le cadre aoptique), de son action dans le groupe. Le lettrisme toujours ignoré des institutions dans sa massivité (oeuvres et artistes) connaît un début de reconnaissance (voir à ce sujet la salle qui lui est désormais consacrée au Centre Pompidou et le récent colloque Le Lettrisme en son temps, essai de contextualisation) mais celle-ci touche essentiellement le groupe, et la visibilité des artistes individuels s'efface devant l'affirmation d'un collectif artistique entériné par la grande Histoire. En deçà et au delà du groupe les artistes lettristes peuvent pourtant se prévaloir d'une œuvre désormais conséquente et pour certains encore largement méconnue. Cette rétrospective enfin souligne combien les avant-gardes souvent renvoyées à une pré-histoire de l'art contemporain (grosso modo la modernité) en sont en définitive la part maudite ; agissant de manière clandestine sans avoir ni à se dédire d'une dynamique historique qu'elles sont sans doute seules à porter ni à se justifier devant les gloires du moment, leurs œuvres prennent toute leur place dans les signes d'une contemporanéité qu'elles entendent bien subvertir (voir la Pyramide du Louvre revisitée par Broutin). Pour ma part présent au vernissage, j'ai eu l'opportunité de livrer le lendemain quelques considérations sur le Soulèvement de la Jeunesse devant un auditoire restreint mais de qualité, de signaler l'importance de cette thématique dans l'oeuvre de Broutin qui sait faire toute sa place à la question politique sans jamais sacrifier l'impératif artistique (voir sa très conceptuelle "sculpture vivante : oeuvre d'indignation créatrice" ici).
Malheureusement, infortune encore une fois, c'est le socialiste Malek Boutih qui sur un constat que je pourrais en grande partie partager faisait le buzz en France avec un rapport par bien des aspects pertinent mais qui au final nous promet une cure de républicanisme obligatoire pour les plus jeunes au lieu du réformisme éclairé dont ce pays a tant besoin, celui du Soulèvement de la Jeunesse par exemple ?
La plaque Tournante impose au gré de ses programmations une ligne clairement ambitieuse, sans œillères ni frontières ; Frédéric Acquaviva a désormais décidé de prolonger son action par la création d'une nouvelle revue, CRU (aka CONTEMPORARY RADICAL UNDERGROUND) associée directement aux évènements programmés et il nous prouve qu'en matière de publications toutes les options n'ont pas encore été explorées : véritable revue/objet (documentation, cd, dvd, photographies... insérés dans une chemise), conjuguant un minimalisme esthétique et un graphisme de haute qualité, la revue est complétée par un site web accessible à l'heureux acheteur qui, une fois renvoyé une photo de lui-même en possession de la revue, se verra communiquer un code lui permettant d'en découvrir le supplément numérique. Au sommaire du premier numéro : Frédéric Acquaviva, Tomomi Adachi, Bernard Heidsieck, Katherine Liberovskaya, Loré Lixenberg, Jacques Lizène, Alvin Lucier, ALex Mincek, Phill Niblock. La revue est distribuée par les Presses du Réel (ici).
 




PS : "...si vous n'êtes pas à la Plaque Tournante, vous êtes à côté de la plaque..." et ce d'autant que les hôtes ont le sens de l'accueil et de la convivialité.



Aucun commentaire: