L'annonce de l'entrée prochaine en bourse de Facebook a de quoi faire tourner bien des têtes et on est en droit de s'interroger sur la nature spéculative des montants revendiqués. Beaucoup se souviennent en effet de la première "bulle" internet et de la crise qui s'en est suivie. Mais les temps changent et la réussite indéniable de ce "gamin" génial est à mettre en perspective avec quelques autres informations économiques plus locales : le Président français s'est ainsi félicité de voir les très onéreux "rafales" trouver enfin preneurs (en l'occurrence l'Inde). Jusqu'à présent ce "bijou", cette "réussite" du savoir-faire industriel français n'avait guère convaincu dans le monde ; avant de sabrer le champagne il paraît prudent d'attendre confirmation de la commande, les vicissitudes de la vie économique n'ayant guère épargné le coûteux volatile par le passé. Dans le secteur de l'automobile, par contre, les résultats ne sont guère encourageants, le volume des ventes réalisées affiche une baisse significative de grosso modo 24% au mois de janvier, l'effet "prime à la casse" n'opère plus et détail cruel, les marques françaises en font les frais tandis que Wolswagen peut envisager l'avenir bien plus sereinement. Dernier détail au tableau : la colère des salariées de Lejaby en lutte pour sauver leur entreprise et leurs emplois. L'intervention des politiques, dans une période électorale, a sans doute pesé dans la participation de Bernard Arnault au plan de reprise, une solution économiquement sérieuse a été trouvée, pour combien de temps ? Voici en quelques lignes l'esquisse d'un monde en pleine transformation avec ses gagnants et ses perdants. La cotation en bourse de facebook est un signal envoyé au marché : voici LA valeur, voici les opportunités de croissance de demain. L'immatériel facebook est la nouvelle terra incognita qui possède en grandes quantités le "nouvel or noir" de l'économie numérique, l'information. Ce point est largement relayé par la presse économique qui souligne aussi combien les nouvelles technologies et leurs performances toujours plus grandes permettent de réaliser des gains de productivité considérables en affinant toujours plus les données par des systèmes sophistiqués de classements, profils, regroupements, dont une partie est réalisée par les internautes eux-mêmes. N'en déplaisent aux technophobes et anticapitalistes de gauche comme de droite, il ne s'agit pas seulement de faire des réseaux sociaux comme Facebook une vitrine pour vendre des espaces publicitaires, d'y appliquer les mêmes recettes qu'à la télévision (taux d'audience et matraquage publicitaire en conséquence). Certes pour l'instant cette logique sauvage domine : le tout gratuit (collectivisme généralisé) cohabite avec un capitalisme sans "entrave" ni "temps morts" qui fait du buzz et de la "connectométrie" la source de revenus publicitaires confortables (le boss de megaupload pourrait nous renseigner sur ce sujet !). Cette part de la publicité n'est pas à négliger, elle devrait permettre de financer la création et les créateurs puisqu'ils fournissent l'essentiel des contenus qui assurent au géant Google par exemple sa prospérité. Mais les enjeux essentiels pour facebook et plus généralement l'économie numérique se jouent ailleurs : Ma page facebook pèse moins économiquement que celle par exemple de telle ou telle gloire du hip/hop ou de la variété électronique. Mais pourtant elle génère à la marge une richesse ("quelques dollars") et plus en profondeur elle participe à son échelle à la constitution d'une nouvelle division du travail dont les retombées économiques sont importantes en dehors de la toile : gestion ET études des données, recherche et innovation dans l'offre ce services et de réseaux (et pas seulement pour vendre des voitures !) car les informations "travaillent", le réseau social ne se contente plus d'enregistrer les inscriptions, il agit et interagit, élabore des scenarii, l'intelligence sociale numérique est le contrepoint d'une révolution technologique qui conduit à une nouvelle division du travail non plus en termes de marchés majoritaires mais en termes de niches avec ses services et protocoles spécifiques, ses créateurs et spécialistes... Facebook compte aujourd'hui 3000 salariés, combien demain ? La situation française se situe à l'arrière-garde de cette "grande transformation" ; ses succès économiques renvoient à un capitalisme de grands-pères et de grandes entreprises privées sur le modèle des Trente-glorieuses, elles doivent leurs succès à leur proximité avec l'État (Dassault, Bouygues par exemple). Sans le soutien de ce dernier on imagine mal ces mastodontes survivre à la concurrence des créatifs et des innovants. On comprend dès lors les diatribes des libéraux contre les interventions de l'État accusé de protéger les rentes de situation, de bloquer la dynamique de l'offre par l'organisation de quasi-monopoles pesant sur les principaux marchés de biens et de services. La réussite de Facebook démontre a contrario la pertinence d'un small business act qui n'a pas les contraintes des grandes bureaucraties d'entreprise ou d'état, cette aventure menée par un entrepreneur/outsider sans titre de légitimité à la périphérie des grands échanges a très vite crée la possibilité d'un nouveau marché, de nouvelles opportunités d'investissement qui désormais vont mobiliser les ressources jusque là allouées ailleurs. Comme l'écrivait très justement Von Mises : "S'il était possible de calculer l'état futur du marché, l'avenir ne serait pas incertain. Il n'y aurait ni perte ni profit d'entrepreneur. (...) Le jugement entrepreneurial ne peut s'acheter sr le marché. L'idée entrepreneuriale qui supporte et amène le profit est précisément l'idée que n'a pas eue la majorité. Ce n'est pas l'anticipation correcte qui produit les profits mais l'anticipation meilleure que celle des autres. Le trophée ne va qu'aux dissidents, qui ne se laissent pas égarer par les erreurs qu'accepte la multitude. Ce qui fait apparaître des profits, c'est de pourvoir à des besoins futurs pour lesquels les autres ont négligé de prendre les dispositions adéquates" (in Abrégé de L'Action Humaine, Les Belles Lettres, 2004, p.58/59)
Voilà qui devrait faire méditer les tenants de la néo-planification "durable", de la relance par les emplois aidés ou ceux du "travailler plus pour gagner plus" car il ne sert décidément à rien de surtravailler dans des secteurs voués à disparaître très vite dans le flux des échanges mondialisés.
Voilà qui devrait faire méditer les tenants de la néo-planification "durable", de la relance par les emplois aidés ou ceux du "travailler plus pour gagner plus" car il ne sert décidément à rien de surtravailler dans des secteurs voués à disparaître très vite dans le flux des échanges mondialisés.
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