C'est dans ce contexte que la candidature de François Hollande s'est peu à peu imposée. Avec lui, les plus réformistes du Ps, ceux acquis depuis longtemps à la nécessité d'un socialisme renouvelé, inspiré par les exemples de la social-démocratie, peuvent donner au Ps cet horizon nouveau pour la présidence qui vient ; les Cahiers se réjouissent de voir que le candidat vainqueur à la Primaire a fait de la Jeunesse sa priorité, alors que la ligne aubriste s'efforçait de réactiver les spectres de la période héroïque du socialisme bedonnant. Les enfants révoltés de mai 68 ont bien vieilli et peinent à s'émanciper de leurs vieilleries mythologiques (la réduction du temps de travail qui a connu son heure de gloire avec la CFDT dans les années 70 comme point d'orgue des Trente Glorieuses et de leur insolente croissance) sans compter qu'ils assument sans doute difficilement de représenter aujourd'hui une bourgeoisie qui vit des rentes d'un modèle social qu'elle a contribué à installer et qu'à l'égard des outsiders et des loosers de son meilleur des mondes elle n'a guère de solutions innovantes à proposer. Laissons les à leurs cadavres... La fracture générationnelle, bien plus que le vieux clivage de la lutte des classes traverse la société ; les logiques de rente paralyse, bloquent les entrants qui découvrent un monde où l'immobilisme est la garantie pour ceux qui ont une place de pouvoir en conserver la jouissance, même si cela se paie d'un statu quo qui finit par détruire même l'idée d'un bien commun et de « vivre ensemble ». François Hollande et son équipe semblent décider, encore trop timidement, à redonner un sens au « rêve français » en conjuguant un sens des réalités inattendu et l'engagement de donner aux générations qui viennent la chance d'un avenir. Bien des réformes devront être entreprises et négociées, certaines ne manqueront pas de hérisser l'électorat socialiste classique et son culte de l'État Providence, de sa bureaucratie, mais nous ne pouvons que soutenir un projet dont nous pensons qu'il peut décliner dans un même moment réformiste inédit en France la question de la jeunesse et de son avenir, la réforme de l'État providence et une dynamique économique de croissance à condition d'aller plus loin dans une libéralisation de la vie économique, au profit des jeunes, des outsiders. Saluons enfin en François Hollande un leader socialiste qui réinscrit la nécessité de l'Europe, contre toutes les tentations protectionnistes et populistes qui trouvent en ces temps d'austérité, hélas, de nombreux défenseurs à gauche. Plus que jamais le "protégisme juventiste" qui semble guider aujourd'hui le Parti socialiste et l'urgence d'un nouveau modèle économique inscrivent l'économie nucléaire d'Isidore Isou comme une référence incontournable de cette période de turbulence et de transformation.