dimanche 9 février 2014

une leçon d'éthique à l'usage des flics et des curés : isidore isou rencontre maurice bardèche


"On m'a traité de Sale Youpin parce que j'ai espéré toute cette évolution vers une société meilleure, paradisiaque pour mes contemporains ; et, maintenant, de partout, des imitateurs des expressions anciennes ; des profiteurs de mon combat - en faveur des créateurs modernes, méconnus avant cette lutte - des plagiaires de mon terme de créativité - à savoir d'invention et de découverte ans les domaines de la Culture - qu'ils ignorent et au nom desquels ils trichent, en donnant un exemple répugnant à leurs enfants, à leurs élèves, des pseudo-juifs, qui ignorent le contenu du monothéisme messianique - en le réduisant à un nouveau chauvinisme de droite, nationaliste et ritualiste, au point d'oublier sa mission bénéfique, internationaliste - ; des pseudo-humanistes vautrés dans la sottise arriérée folklorique - en méconnaissant la ligne d'or des génies exemplaires de tous les domaines de la culture kladologique, inspirés de tous les peuples, séparés par des ersatz de prophètes ou d'athées, devenus portes parole de la divinité, c'est-à-dire des idolâtres sans lendemain - s'opposent à mes dévoilements car ils se veulent les idéologues des régimes de l'ouest de l'Est, du Nord et du Sud.
Le juriste Jean Matthyssens, compagnon de Jean Moulin, m'a dit que je représente à ses yeux ce que la Résistance a espéré (...). En même temps des ex-résistants ou leurs enfants retournent à leurs affaires lamentables, commettent des escroqueries intellectuelles ou matérielles ignobles, et se comportent comme des néo-nazis devant les combattants mouvements d'invention et de découverte  jusqu'à la formation d'une société paradisiaque - de bonheur accru en échange d'une moindre peine - ou jusqu'à la fin du monde.
Un jour, à la Société des auteurs de livres sur le cinéma et la télévision, quelqu'un me présenta Maurice Bardèche qui avait publié avec Robert Brasillach, avant ou pendant la dernière guerre mondiale, une histoire du 7ème art, où vers 1944, j'avais découvert, ébloui - parmi des banalités antisémites totalitaristes, lamentables - l'existence, l'oeuvre, les images des films de Méliès, Griffith, Eisenstein, Eric Von Stroheim, René Clair et autres grands créateurs d'un domaine, que mon ignorance, ma fréquentation des "salles obscures", m'avait réduit à considérer comme un appendice industriel du théâtre ou du music-hall.
A ma demande, l'ancien nazi ou pro-nazi m'accorda un rendez-vous chez lui, et, dans son bureau, et dans son bureau, d'abord, il refusa de répondre à mes questions naïves sur les causes et l'état présent de ses conceptions anti-juives, puis il me laissa lui exposer mes idées sur l'évolution de la poésie de Baudelaire au Lettrisme, sur l'évolution du roman de Stendhal à l'hypergraphie, sur l'économie nucléaire ou le soulèvement de la jeunesse, et donc sur l'externité, source de créativité pure ou détournée, incluant l'erreur chauviniste, hitlérienne.
Il me donna l'impression d'accepter un grand nombre de les conceptions, du moins par des formules, à peu près, de ce genre :
"Moi qui croyais que le lettrisme était un mouvement de "farfelus", alors que vous m'avez l'air d'apporter des expressions inédites... Vous confirmez ce qu'on a écrit de moi, au point de me convaincre que je n'ai jamais été un romancier... Ce que vous venez de dire sur Marcel Proust m'encourage à écrire un livre sur un auteur que j'aime beaucoup....".
Le directeur de la revue de droite Défense de l'occident, m'avait fait penser qu'il allait renoncer à ses conceptions sur le judéo-capitalisme-communisme, pensée communiquée plus tard à quelques-uns de mes camarades, qui ne tardèrent pas à me montrer l'inanité de mes illusions. Du moins j'avais accompli une action de super-propagande créatrice auprès d'un réactionnaire notoire. 
(...) Contre un système d'éthique grossière, moléculaire, de type stalinien, hitlérien ou surréaliste, nous proposons une éthique atomique et électronique, basée sur la description originale plus précise des particules des données de la culture et de la vie, qui nous impose le comportement le plus profond, contemporain, ou du moins la compréhension la plus profonde des problèmes posés par le comportement des hommes et surtout des artistes présents. (...) Nous pouvons combattre et abattre un Eichmann quelconque pour des crimes précis et reconnaître, par ailleurs, qu'il a pu prononcer, à un moment donné, une parole juste et charitable, justement parce que nous pensons que l'action est toujours partielle et n'exige pas un aveuglement complet, ni la capacité de salir totalement, sans discernement, un être quelconque".
Isidore ISou, in Contre L’Internationale Situationniste, Hors commerce D'art, p. 364-367





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